Je vous présente les maquettes d’un cotre pilote, réalisé entièrement à la main par Pépé G. le papa de mon ami ( le propriétaire de la Lancia Ypsilon et de la Toyota Prius ).


Au début du siècle il servait à amener le pilote du port de Rouen à monter à bord du voilier en rade du Havre pour le guider jusqu’à Rouen.


Je vous retrace l’histoire de ces cotres du numéro 15 du
 

Cotre Ernest-Manchon pilote de baie de Seine

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Mise à jour : le 13 mars 2008 10:46

Le pilote R3, Ernest-Manchon, l’un des trois beaux cotres construits par Julienne, sort du port du Havre pour croiser en baie. Voiles bordées plat, il remonte avec aisance au plus près. ▲

Au début du 20 ème siècle, l’idée de pilotage évoque immédiatement les grands cotres, les hirondelles de la Manche tant chantées pour leur grâce et leur marche, dont Jolie-Brise, par son glorieux palmarès est devenu le symbole. Si les pilotes du Havre possèdent effectivement la flottille la plus importante en Baie de Seine, l’histoire locale de ce métier a d’autres facettes moins connues, comme la navigation dans l’estuaire et la remontée jusqu’à Rouen. Retracer les difficultés de cette navigation et le métier des pilotes de Seine permet de comprendre quelle complémentarité, ou parfois rivalité, pouvait exister entre les pilotes extérieurs et ceux de l’intérieur Jean-Pierre Robichon, pilote de Seine lui-même, était particulièrement bien placé pour évoquer la genèse difficile de l’autonomie des stations de l’intérieur : Quillebeuf et Villequier.


L’existence des pilotes de Seine est directement liée à l’importance du trafic maritime destiné au port de Rouen et aux difficultés de navigation sur tout le cours de la Basse-Seine. Dans sa description des côtes et ports français, Charles Lenthéric en brosse au début du siècle un portrait précis = “ malgré la distance de près de 130 kilomètres qui le sépare de l’embouchure de la Seine, malgré les sinuosités du fleuve qui serpente en dessinant trois courbes grandioses d’une grâce symétrique et d’une harmonie parfaite, Rouen peut être considéré comme un véritable port de mer, tout comme Nantes et Bordeaux, avec lesquels il présente de nombreux points de ressemblance. (...)


Il y a quelques  années à peine, les caboteurs de 3 m à 3,50 m de tirant d’eau pouvaient, seuls , remonter le fleuve jusqu’à Rouen. Aujourd’hui les navires d’un mouillage de 5,50 m à 6 m, portant de 1700 à 2000 tonneaux effectifs, y viennent d’une manière régulière, et par certaines marées le port est même accessible à des bateaux calant 7 m en plein charge.


Rouen est resté et restera toujours un port de premier ordre, et son activité croissante ne semble pas devoir jamais décliner. “

Variations du chenal dans l’estuaire de 1874 à 1879. ▲

Au début du 20 ème siècle, l’idée de pilotage évoque immédiatement les grands cotres, les hirondelles de la Manche tant chantées pour leur grâce et leur marche, dont Jolie-Brise, par son glorieux palmarès est devenu le symbole. Si les pilotes du Havre possèdent effectivement la flotille la plus importante en Baie de Seine, l’histoire locale de ce métier a d’autres facettes moins connues, comme la navigation dans l’estuaire et la remontée jusqu’à Rouen. Retracer les difficultés de cette navigation et le métier des pilotes de Seine permet de comprendre quelle complémentarité, ou parfois rivalité, pouvait exister entre les pilotes extérieurs et ceux de l’intérieur Jean-Pierre Robichon, pilote de Seine lui-même, était particulièrement bien placé pour évoquer la genèse difficile de l’autonomie des stations de l’intérieur : Quillebeuf et Villequier.


L’existence des pilotes de Seine est directement liée à l’importance du trafic maritime destiné au port de Rouen et aux difficultés de navigation sur tout le cours de la Basse-Seine. Dans sa description des côtes et ports français, Charles Lenthéric en brosse au début du siècle un portrait précis = “ malgré la distance de près de 130 kilomètres qui le sépare de l’embouchure de la Seine, malgré les sinuosités du fleuve qui serpente en dessinant trois courbes grandioses d’une grâce symétrique et d’une harmonie parfaite, Rouen peut être considéré comme un véritable port de mer, tout comme Nantes et Bordeaux, avec lesquels il présente de nombreux points de ressemblance. (...)


Il y a quelques  années à peine, les caboteurs de 3 m à 3,50 m de tirant d’eau pouvaient, seuls , remonter le fleuve jusqu’à Rouen. Aujourd’hui les navires d’un mouillage de 5,50 m à 6 m, portant de 1700 à 2000 tonneaux effectifs, y viennent d’une manière régulière, et par certaines marées le port est même accessible à des bateaux calant 7 m en plein charge.

Rouen est resté et restera toujours un port de premier ordre, et son activité croissante ne semble pas devoir jamais décliner. “

Les pilotes de l’intérieur.


L’entrée et la sortie de l’estuaire de la Seine présente cependant à cette époque toujours quelques incertitudes et nécessitent le secours de pilotes expérimentés. Les embouchures de tous les fleuves sont en effet le théâtre de transformations incessantes et quelquefois très complexes, dues à la lutte sans relâche du courant fluvial avec les mouvements divers dont la mer est continuellement agitée. Le nombre de navires à destination de Rouen justifie donc largement la présence de pilotes mais, curieusement, l’histoire du pilotage en Seine débute par une absence de bateau.

Alors que le décret de 1806 oblige les pilotes de l’extérieur, c’est à dire de Honfleur et du Havre, à avoir des embarcations qui peuvent les emmener en mer au-devant des navires, un règlement spécial s’applique au stations dites intérieures, parmi lesquelles il faut comprendre Quillebeuf et Villequier. Ce règlement restrictif, agit en faveur des pilotes extérieurs en accordant le privilège du pilotage jusqu’au travers des jetées du Havre, ceux de Quillebeuf ne pouvant prendre leur fonction qu’au-delà de cette limite. Il n’y a donc pour eux aucun profit à aller prendre des navires au-delà de leur station. Cette limitation instaurée en 1820, renouvelée en 1837 et 1843, a pour conséquence de leur ôter toute envie d’armer leurs propres bateaux.

Cette situation ambigüe les mettant en position de dépendance des pilotes du Havre va se prolonger jusqu’en 1889 au rythme des décrets souvent contradictoires. Malgré tout, dans cette fin du XIXe siècle, à la suite de plaintes et de plusieurs naufrages, l’administration et la chambre de commerce de Rouen vont permettre, puis encourager, l’autonomie des pilotes Quillebeuf et faire en sorte que plusieurs cotres soient armés dans les stations intérieures.


Le naufrage du Stefanino.


Le 15 septembre 1880, survint un naufrage qui va avoir des répercussions importantes et inciter les pilotes de Seine à se doter de leur propre matériel. “ Ce jour là, par mer houleuse et mauvais temps d’ouest-nord-ouest, vers 18 heures, se présente sur rade du Havre un trois-mâts italien, le Stefanino, parti de Baltimore le 11 août à destination de Rouen avec un chargement de 30800 boisseaux de blé. Il demande par signaux au pilote de Quillebeuf. Vers 19 heures, aucun pilote ne se présentant, le navire se dirige d’abord vers le Havre, puis fait route vers la Seine. Du sémaphore de la jetée du nord-ouest, on voit le danger et on essaie de lui envoyer un pilote du Havre, mais l’état de la mer ne le permet pas. On arme alors le canot de sauvetage sous le commandement du patron Lecroisey, qui sort du port vers 20h30. Entre-temps, le Stefanino a tenté de mouiller une première fois par le travers de l’anse de l’Eure : il per sa chaîne. Emporté par la violence du vent, il mouille sa deuxième ( et dernière ) ancre en face des Chantiers de la Méditerranée et fait tête. Du canot de sauvetage parvenu le long du navire italien, le pilote Bonzan presse le capitaine d’abandonner son bâtiment. Se croyant en sécurité avec assez d’eau, le capitaine Genta, suivi de ses douze hommes d’équipage,  refuse tout d’abord. On ne sait comment lui expliquer qu’à basse mer, il va talonner et se briser. Alors l’embarcation de sauvetage mouille son ancre et reste en attente à proximité. Bientôt la mer baisse, le Stefanino touche, et dans les coups de ressac la mâture menace de tomber. Devant l’impossibilité de tirer le navire du piège, les treize italiens l’abandonnent et sont recueillis par le canot de sauvetage. Au matin on découvre le Stefanino submergé sur place. Comme il assèche à basse mer, couché sur son flanc tribord défoncé, il ne reste plus qu’à sauver les agrès récupérables; déverguer les voiles et dégreer les vergues “. ( Le Journal du Havre ).

Un chroniqueur local, Emile Prat, dénonce les modifications du règlement des pilotes de Seine qui ont abouti à ce sinistre : “ d’abord leurs salaires sont diminués dans une forte proportion que l’on peut estimer à peu près au quart de ce qu’ils étaient autrefois... Le nouveau règlement interdit en outre aux cinquante aspirants-pilotes de Quillebeuf, de  monter ou de descendre, dans le parcours de la Seine, les bâtiments qui calent plus de 4,90 m. Or, c’était généralement eux, et non les pilotes brevetés, qui allaient accoster les navires au large : plus jeunes et plus hardis que ceux-ci, ils n’hésitaient pas, par les plus fortes mers, à aller offrir leurs services aux capitaine. Par suite du nouveau règlement... ils seraient désormais obligés, arrivés en Seine, de remettre le navire à un pilote breveté, si ce navire cale plus de 4,90 m... ils se refusent, pour gagner une somme dérisoire, à aller à la recherche des navires au large...

Mais voici le changement le plus important qui ait été opéré... auparavant, ils avaient la faculté de se servir des bateaux pilotes du Havre pour se rendre en mer : cette faculté leur a été retirée...Les steamers des lignes régulières, se rendant à Rouen...arrivés en rade du Havre, mettent à la mer un canot lequel va chercher le pilote à terre et le ramène à bord. Mais cette façon de prendre leurs pilotes... est pour eux, une perte de temps considérable, car ils se trouvent forcés de rester en rade, et d’attendre, au moins la marée suivante pour continuer leur route... pour les voiliers, le dommage est beaucoup plus sérieux, et il peut même en résulter des incidents très graves. C’est ce qui est arrivé pour le Stefanino... il est maintenant considéré comme perdu... Tel sera, désormais le sort qui peut être réservé aux navires remontant à Rouen pendant le gros temps, si l’on ne revient , au plus tôt, sur un règlement qui, de l’avis de tous nos marins, est, non seulement défectueuse, mais encore dangereuse... “

Epilogue : il fallut revenir en arrière, et c’est ce que demanda aussitôt la Chambre de Commerce de Rouen au ministre de la marine.

En octobre 1965, pendant les travaux de creusement du nouveau bassin de marée du Havre, la drague Mascaret “ tombait “ sur l’épave d’un navire en bois qui, après enquête, se révélait avoir une longueur de 47 m et être le Stéfanino construit en 1869. L’épave fut dépecée par la drague, et on en tira 45 tonnes de bois, seuls vestiges d’un naufrage qui avait contribué, plus que tout autre, à la création du matériel naval des pilotes de Quillebeuf.

 

L’évolution du statut des pilotes de Seine de 1806 à 1889.


Limités à la navigation en Seine et démunis de bateau, les pilotes de  Quillebeuf ne peuvent assurer la traversée de la rade pour les navires se rendant à Rouen. Ces bateaux doivent se payer un pilote extérieur jusqu’au jetées du Havre, sans pouvoir le refuser. Cette rente fut l’objet de plaintes de plus en plus fréquentes du commerce. Sur la demande de la Chambre de Commerce de Rouen, le décret de 1854 prescrivait : “ Il est permis aux pilotes de Quillebeuf d’aller prendre à la  mer les navires destinés pour la Seine... Si le navire qu’ils abordent a déjà un pilote de l’une des stations extérieures, et ne doit relâcher ni au Havre, ni à Honfleur, ils en prennent immédiatement la conduite. Dans ce cas le pilote de l’extérieur est payé proportionnellement à la distance qu’il a parcourue... Il est permis aux pilotes de la Seine de s’embarquer dans les canots des pilotes du Havre et de Honfleur, si ces derniers y consentent. “ Ce que les pilotes du Havre, craignant la concurrence, refusent bien sûr de faire.


En décembre 1854 les délégués sont reçus et des majorations de salaire ainsi qu’une indemnité supplémentaire sont décidées pour faciliter l’armement d’embarcations de mer. L’affaire continue à traîner. En 1886, on trouve une trace d’une demande d’aide pour la construction d’une grande chaloupe de mer, en remplacement de celle qui servait alors et ne présentait plus de sécurité. On alloua 200 F sur des frais de construction s’élevant à 480 F. Cette chaloupe dura jusqu’en 1875, où “ venue à bout de bord “, elle fut remplacée par une nouvelle qui servit jusqu’à la mise en service du remorqueur Rouen en 1887. Mais cette embarcation unique ne suffisait pas et une dizaine de pilotes de Quillebeuf embarquaient chaque jour sur les bateaux de Honfleur et du Havre.


Il fallait sortir de cette situation de dépendance. La Chambre de Commerce de Rouen encourageait la tentative individuelle ; c’est ainsi qu’elle remboursait au pilote Jacquot la prime d’assurance de la chaloupe qu’il avait fait construire à ses frais, et le faisait distraire du service du canal à Tancarville, beaucoup moins rémunérateur. Parallèlement elle faisait envoyer de Cherbourg, par la Marine Nationale, en dépannage, une grande chaloupe à vapeur de douze mètres pour servir au balisage et sondage, sous les directives du chef du pilotage, A. Dormoy.


Cet expédient ne pouvait durer. Le décret du 1er juille 1880, révisant le règlement du pilotage allait provoquer un crise, d’où sortirait la solution. Ce décret réduisait le salaire des pilotes et leur interdisait de monter à bord des bateaux-pilotes du Havre et de Honfleur, en raison du temps qu’ils passaient à croiser au large, avec pour conséquence une ignorance des changements intervenus dans les passes de l’estuaire, lorsqu’ils embarquaient enfin sur un navire. Les pilotes de Quillebeuf se servirent adroitement de cette interdiction ; ils attendirent tranquillement sur les quais du Havre que l’on vint les chercher pour conduire en Seine des navires. Il fallut revenir en arrière dans le décret du 14 mars 1884, qui leur rétablit leurs salaires antérieurs et déclarait leur service à la fois intérieur et extérieur, les obligeant à aller à la mer sans leur en donner les moyens.


On devait résoudre le problème, toutes les parties intéressées en avaient conscience. Depuis que les travaux d’endiguement de la Seine avaient été entrepris en 1846, le nombre et la capacité des navires allant à Rouen augmentaient régulièrement. La valeur des biens mis en jeu exigeait que le service du pilotage soit irréprochable. Déjà un chef du pilotage de la Seine d’une incontestable valeur avait été nommé en novembre 1887, Amédée Dormoy. C’est lui qui informe des aspects du problème l’amiral Cloué, rapporteur auprès du Conseil d’Etat, lors de l’étude que ce dernier vint entreprendre en 1888 sur les lieux. L’amiral Cloué était convaincu, puisqu’il écrivait en décembre 1888 au vice-président de la Chambre de Commerce de Rouen : “ Je ne suis pas tout à fait partisan des bateaux spécialement affectés au pilotages de la basse Seine et qui empêcheraient ces gens d’aller à la mer dans les bateaux du Havre ou d’Honfleur où ils sont si mal et qui leur coûtent 80 000 F par an “.


Le décret du 8 janvier 1889 sortit sans que l’administration osât y insérer une clause d’obligation d’acquisition d’embarcation. Mais la Chambre de Commerce de Rouen menaça d’empêcher les pilotes de percevoir les surtaxes pour les navires à vapeur pris à la mer et qu’ils calculaient sur la taxe des voiliers ce qui leur était beaucoup plus avantageux, à moins qu’ils ne se munissent de bateaux-pilotes. Amédée Dormoy pouvait écrire : “ La mise en demeure de faite aux pilotes par la Chambre de Commerce les émeut beaucoup. On se réunit, on discute : la note générale est qu’il faut avoir des bateaux, que la corporation est acculée à une nécessité inéluctable, mais que la taxation présente des salaires doit être maintenue et aussi l’indemnité de mise à bord. Donnant, donnant : les deux choses doivent être absolument connexes. Le retrait de l’une entraînerait le retrait de l’autre. “

Situation géographique de Quillebeuf et Villequier par rapport à la baie de Seine. ▲

© image Chasse-Marée

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